Dans la mémoire collective esvrienne ces arrestations sont liées au mariage de Gustave HODEBERT, fils d’un épicier  Georges-Marcellin HODEBERT dont le magasin était sur la place du monument aux morts du village.

Ce jeune homme, 23 ans, que l’on peut dire  irresponsable, fait un  mariage en grande cérémonie en pleine période d’occupation alors qu’il est lui-même soit prisonnier évadé, soit selon d’autres témoignages, réfractaire au STO (service de travail obligatoire) qui contraint les jeunes français à aller travailler en Allemagne pour remplacer la main d’œuvre allemande  partie aux combats.

De toute  façon  il est en situation irrégulière et devrait savoir qu’il met gravement en danger les personnes impliquées dans son mariage. Le fait que la future épousée, Berthe ROTHIER, soit enceinte a peut-être était un argument pour imposer sa décision. Toutefois la naissance de l’enfant  n’interviendra que le 22 septembre après la libération surprenante de sa mère du camp de Ravensbrück le 19 aout 1944.

Le maire d’Esvres, Auguste NOYANT, refuse de célébrer le mariage civil qui a lieu à Saint Branchs  en décembre 1943 avec Marcel LEJEAU, maire de cette commune.

Le mariage religieux est célébré en janvier, à Esvres, par l’abbé LHERMITE. Le repas se passe  au restaurant des Bons Enfants où la mariée est employée. Chose étrange, un bal a été exceptionnellement autorisé par l’occupant ; il a lieu après le repas comme c’est la tradition.

 

Le lendemain de ces noces, vraisemblablement le dimanche 9 janvier selon des témoignages rapportés par Gérard Cettour-Baron dans ses différents ouvrages, trois membres de la Gestapo débarquent en camion à Esvres  accompagnés de Clara KNECHT leur interprète alsacienne connue pour sa cruauté, et d’un auxiliaire, Jean CHANVRIN, qui fera une déposition sur ces évènements après guerre.

D’après Chanvrin c’est une dénonciation déposée par une femme délaissée par Gustave Hodebert qui aurait déclenché l’opération.

La Gestapo arrête le père du marié, Georges-Marcellin HODEBERT, et pille son épicerie ; toutes les denrées alimentaires et l’argent sont emportés. Le vieil épicier est tabassé par Clara KNECHT « qui lui arrache les cheveux par poignées » selon le témoignage de l’auxiliaire de la Gestapo cité ci-dessus. La jeune épouse Berthe Hodebert est aussi « écrasée sous les coups » puis chargée dans le camion.

Gustave Hodebert s’enfuit sans se soucier ni de son père ni de sa femme.

 Hilaire BARON, témoin du mariage mais qui est peut-être fiché comme membre de la résistance PTT (service public des Postes, Télégraphe, Téléphone) est arrêté dans les mêmes conditions.

Les tortionnaires roulent ensuite vers la ferme du maire au hameau de Champgault. Ils arrêtent celui-ci et ne repartent qu’après avoir tranquillement dégusté le poulet que madame NOYANT avait cuisiné pour le repas de midi.

L’abbé LHERMITE est également arrêté sans doute plus discrètement car les esvriens ne témoignent pas de ce moment tragique. Déjà incarcéré pendant trois mois en 1942 il ne pourra pas échapper à la plus lourde peine et sera déporté comme les autres protagonistes de ce drame.

 

Ces cinq personnes, ainsi que le maire de Saint Branchs, Marcel LEJEAU, seront déportées vers les camps nazis. Seule Berthe, l’épouse de Gustave en reviendra vivante.